Guinée ; 62ème Fête d’Independence sur Fond de Tension Politique, Répression des Libertés

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President of Guinea, Alpha Conde

La République de Guinée a soufflé ce vendredi l’an 62 de son accession à l’Indépendance. De 1958 à 1984, Feu Sékou Touré, le Premier président de la Guinée libre a géré le pays jusqu’au 26 mars 1984. Jour auquel, il est mort à Cleveland aux Etats Unis d’Amérique, suite à une rupture de l’artère aorte. Le 3 avril 1984, une junte militaire dirigée par le Colonel Lansana Conté accède au Pouvoir.  Les putschistes libéralisent l’économie, engagent des réformes dans le secteur des libertés publiques. Ils optent pour un libéralisme transversal qui ouvre la voie au multipartisme intégral et à la consolidation des droits de l’homme.

Nouveau souffle aux médias

De 1984 au 22 décembre 2008, date de la mort du General Lansana Conté, des acquis, il y en a eu dans le domaine de la liberté d’opinion et de la presse. Les journaux privés sont les premiers à naitre, l’audiovisuel attendra quelques années.

 L’organisation d’un grand forum de Media Foundation sur les enjeux de la libéralisation des ondes en Guinée a été un des détonateurs des initiatives qui ont abouti à la libéralisation des ondes. C’est un des points positifs inscrits à l’actif du General Lansana Conté. Le 23 décembre 2008, lendemain de la mort du General Conté, une junte se saisit du pouvoir. Elle est dirigée par le Capitaine Moussa Dadis Camara, un jeune officier au sang chaud. Il ne tarda pas à dissoudre la Constitution, les institutions et à instaurer une transition militaire. Elle a créé un Conseil national de la transition qui a doté la Guinée d’une nouvelle Constitution et d’une nouvelle loi sur la liberté de la presse et une loi sur la création de la Haute autorité de la Communication. La loi 006 relative à la liberté de la presse a remplacé la loi L005. La Loi L 003 relative à la Haute Autorité de la Communication a remplacé la loi L002 relative au Conseil national de la Communication.

Erosion des droits sous le régime d’Alpha Condé

Cette nouvelle loi sur la liberté de la presse dépénalise les délits de presse. En lieu et place des peines de prisons, elle a donné naissance à des amendes. Cette réforme a été saluée dans la corporation. Les journalistes et les défenseurs des droits des medias ont salué cette nouvelle donne sur l’échiquier des medias. C’est aussi un des points positifs inscrits au tableau des réformes engagées par Capitaine Moussa Dadis Camara et sa junte militaire. C’est ainsi qu’en 2010, sur la base de cette nouvelle Constitution de 2010 et ces nouveaux textes de loi, les militaires ont passé le pouvoir aux civiles

Le Président Alpha Condé arrive au pouvoir dans un environnement marqué par des acquis en matière de consolidation de la liberté de presse, la liberté d’expression. L’espoir était grandissant dans le microcosme médiatique et celui des droits de l’homme et des peuples. Elu pour un mandat de 5 ans renouvelable une seule fois, le président Alpha Condé achève son premier mandat en 2015 dans un contexte politique marqué par une crise politique et sociale sans commune mesure.

 Au terme de ce premier mandat de 5ans, le Président Alpha Condé fut réélu dans un contexte de crise politique sans précèdent pour la Guinée. Chemin faisant, des sirènes révisionnistes ont mis le président dans la posture de forcer un troisième mandat anti constitutionnel au terme de son second et dernier mandat qui s’achève le 22 décembre 2020.

 En 2018, en parfaite harmonie avec les sirènes révisionnistes, le Président Alpha Condé a décidé de lancer des consultations autour d’une nouvelle Constitution rédigée par des magistrats, des hommes de droits et des ministres de la République. La première mouture a été partagée à des catégories sociales. Au terme de cette consultation, le Président Alpha Condé a réussi à caporalisé toutes les institutions, l’administration. Il a déclaré sa flamme pour un troisième mandat anti constitutionnelle.

La Naissance de la FNDC et la répression massive  

Le 14 octobre 2019, est né en Guinée, un mouvement citoyen appelé « Front national pour la Défense de la Constitution (FNDC) ».

Ce front qui regroupe l’opposition, la société civile, les syndicats et des activistes des droits de l’homme a marqué son opposition pour tout tripatouillage de la Constitution visant à donner au président Alpha Condé, en fin de mandat constitution, un mandat supplémentaire. C’est dans ce contexte que le 22 mars 2020, le Président Condé a soumis à referendum une nouvelle Constitution qui supprime toutes les dispositions de l’article de la Constitution de 2020 qui indique que nulle ne peut avoir plus de deux mandats constitutionnel.

La mouture de la Constitution soumise au referendum n’est pas celle qui a été promulguée. Cette autre situation a amené le FNDC et l’opposition a organisé une centaine de manifestations de rue. Pour demander au Président Alpha Condé de retirer la nouvelle Constitution et de se contenter de la Constitution de 2010 sur laquelle il a prêté serment en 2010 et 2015.

Ces manifestations réprimées au sang ont enregistré une cinquantaine de mort à Conakry, une cinquantaine dans la région du sud de la Guinée, précisément la Région administrative de N’Zérékoré. On ne compte pas moins de 250 activistes anti 3eme mandat, anti tripatouillage constitutionnel qui ont été arrêtés lors des manifestations, bastonnés, emprisonnés.

Les principaux leaders du Fndc Abdourahmane Sanoh, Ibrahima Diallo, Sékou Koundouno, Mamadou Bailo Barry, Oumar Sylla Foniké Mengue ont été arrêtés détenus pendant des mois. Jugés condamnés avec sursis. Leur tort, c’est de s’être opposés au troisième mandat pour le Président Alpha Condé. Actuellement Souleymane Keita, un activiste anti 3 mandat qui réside aux Etats Unis d’Amérique, rentré au pays récemment a été arrêtés alors qu’il venait de lancer un mouvement social contre le troisième mandat. Il est actuellement détenu à la maison centrale.

 Ismaël Condé, un ancien responsable du parti au pouvoir Rpg arc en ciel du Président Alpha Condé est aussi en prison. Son tort aura été de s’opposer au 3ème mandat. Il a démissionné du parti après avoir publiquement demandé au président Condé d’abandonner son projet de 3ème mandat.

Les médias face aux présidentielles

Pour mettre les journalistes au pas concernant ce projet de 3eme mandat, le pouvoir a soumis à l’Assemblée nationale le vote de la nouvelle loi portant composition, organisation et fonctionnement de la Haute Autorité de la Communication (HAC). L’adoption de cette Loi Organique caporalise la HAC

Ce document révisé qui porte le numéro 005/SG/AN, a été examiné et adopté, le vendredi 3 juillet 2010. Il consacre une forte mainmise de l’exécutif sur cette institution chargée de réguler les médias en Guinée. Le Président de l’Institution est nommé par décret du président de la République alors que dans l’ancienne loi, ce dernier était élu par ses pairs. Chez de nombreux professionnels de medias, on craint que la HAC ne soit désormais une simple caisse de résonance.

De 2018 à 2020, une centaine de journalistes guinéens ont été brutalisés, mis en prison, sous contrôle judiciaire ou tout simplement mis en prison pour leurs interventions dans des débats axés sur le troisième mandat, ou sur les dérives du pouvoir. Des radios, des sites, des journaux ont été suspendus pour des motifs divers.

C’est dans ces conditions de musèlement des activistes de la société civile, de caporalisation des institutions, d’intimidation de la presse qu’arrive une élection présidentielle controversée. Le Fndc fidèle à sa ligne multiple les manifestations de rue qui sont reconnues par la Constitution mais qui sont souvent réprimées au sang. Ce qui fait dire à des observateurs que la Guinée fait face au scrutin présidentiel le plus dangereux de son histoire.

 Les scrutins sont souvent des moments de tension électorale, des moments d’accrochages entre les Forces de défense et de sécurité et les medias. C’est dans ce cadre que Media Foundation for west africa (MFWA) en partenariat avec l’AGEPI, l’Association Guinéenne de la Presse Indépendante (AGEPI), a organisé un cadre de concertation entre « media- services de sécurité » pour la sécurité des journalistes en période électorale et post électoral le 28 Octobre 2019.

Lors de ce forum d’échange entre force de l’ordre et journalistes, des points d’action pour l’amélioration des relations entre les médias, et les forces de défense et de sécurité ont été identifiés.  Un comité ad hoc de 11 membres composés de journalistes, officiers de FDS, organisation des médias, juristes, magistrats est chargé de l’élaboration d’un document axé sur les bonnes relations entre les FDS et les médias. Le 17 Septembre 2020, les membres du comité se sont retrouvés en vue de relire et éventuellement valider le projet de Cadre de concertation médias et des services de sécurité, ce document ayant été établi et soumis par un consultant recruté par la MFWA à cet effet.

 En Septembre toujours, le président de l’Urtelgui (Union des radios et télévisions libres de Guinée) a sillonné les régions administratives de Guinée. Pour une série de formation de journalisme en prélude à la Présidentielle. Il a expliqué aux journalistes de ces régions comment assurer correctement la couverture médiatique d’un scrutin présidentiel

« Quels sont les rôles qu’un journaliste doit jouer avant pendant et après les élections. La responsabilité sociétale d’un journaliste et la gestion des rumeurs. Parce que je vous le dis, l’élection présidentielle est la plupart du temps émaillée de tensions et de violences parce que ça met en jeu les ethnies. Il faudrait rappeler aux journalistes le rôle qu’ils doivent jouer pour la quiétude sociale. Comme vous le savez, il y a certains parmi vous qui n’ont jamais couvert des élections » a dit Sanou Kerfalla Cissé

Le contexte politique, social tendu dans lequel se tient la présidentielle du 18 octobre inquiète les organisations de défense des médias, de la liberté d’expression et d’opinion. C’est ce qui fait que d’autres formations sont prévues pour les journalistes avant le scrutin prévue le 18 octobre. Tous ces appuis visent à protéger les journalistes dans cet Etat où le pouvoir ne tolère aucun son discordant en déphasage avec le 3eme mandat, y compris de la part des journalistes. La MFWA appelle alors les médias guinéenne à faire preuve de fortitude, deligence