Les journalistes travaillant au Mali font un métier hautement risqué en ces périodes de transition dirigé par les Militaires et des attaques djihadistes au centre et nord. Trop souvent, ils exercent ce métier, “la peur au ventre”. L’enlèvement d’un journaliste français au Mali du nom Olivier Dubois, collaborateur de plusieurs médias maliens et français illustre éloquemment ces menaces sur la sécurité des journalistes. Olivier Dubois d’origine Martiniquaise et âgé de 46 ans est un journaliste indépendant.
Connu pour être un journaliste aguerri et rigoureux, Olivier Dubois déclare dans une vidéo être entre les mains du GSIM (Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans), une branche locale d’Al Qaïda. Il a été enlevé à Gao (Mali) le 8 avril 2021. Olivier Dubois a disparu depuis le 8 avril 2021 alors qu’il cherchait à rentrer en contact avec Iyad Ag Ghali, un chef de guerre touareg, devenu Chef djihadiste malien.
Olivier Dubois est journaliste indépendant et collabore régulièrement pour Le Point, Jeune Afrique et Libération. La bonne nouvelle est que plus de deux mois, il se dit qu’Olivier Dubois est bien vivant. La bulle de silence qui entourait sa disparition à Gao, le 8 avril, a éclaté pour laisser place à une vidéo de 21 secondes. Olivier Dubois y parle d’une voix claire, très précise, sans doute un peu trop pour être naturelle, surtout quand ses mains trahissent une grande nervosité. Le décor est tristement familier, tente couleur sable, chèche et tapis vert olive, vaguement militaire: c’est exactement la mise en scène des vidéos des otages précédents au Mali, et tout indique qu’il est retenu par un groupe djihadiste. Et pourtant dans l’un de ces derniers tweets, Olivier Dubois avait rencontré M. Youssouf Toloba, le chef de Dan Na Ambassagou, organisation autonome de lutte contre les djihadistes en Pays dogon (Centre du Mali)
Les circonstances de l’enlèvement du journaliste français Olivier Dubois
Dans la vidéo diffusée le 5 mai 2021 sur les réseaux sociaux, le journaliste français Olivier Dubois affirme être l’otage des djihadistes du Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans. Comment s’est-il retrouvé là-bas ? Qui sont ses ravisseurs ? Comment le rapt a eu lieu ?
Avant son arrivée le 8 avril à Gao, Olivier Dubois avait, par un intermédiaire, échangé des lettres avec un supposé chef djihadiste qui l’attendait. Dans les missives que le correspondant RFI à Bamako Serge Daniel a pu consulter, il s’agissait d’un reportage. Il comptait réaliser l’interview d’Abdallah Ag Albakaye, un cadre dans la région du Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans.
À son arrivée à Gao, le même intermédiaire, du nom de Souleymane, l’accueille à l’aéroport. Les affaires du journaliste déposées à l’hôtel, il part au lieu du rendez-vous avec le chef djihadiste à l’intérieur de la ville de Gao. Comme convenu, il est sans son matériel de travail, ses futurs ravisseurs craignant d’être suivis.
Olivier Dubois a eu le temps de dire à Souleymane : « Si dans 45 minutes, tu n’as pas de mes nouvelles, il faut prévenir ma famille et Barkhane ». Une semaine après sa disparition, l’inquiétude s’installe. Ses proches se demandent s’il a été kidnappé ou si cette disparition est une stratégie mise en œuvre par le groupe djihadiste pour échapper à la surveillance des forces maliennes et internationales. En lien avec les autorités françaises, famille et amis choisissent de garder le secret, en attendant d’y voir plus clair. Souleymane, l’organisateur du voyage: « Je suis inquiet, Olivier a été sûrement enlevé ». L’intéressé confirme lui-même l’information dans une vidéo en précisant qu’il est entre les mains du GSIM, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (ou JNIM). Depuis la diffusion de cette vidéo comme preuve de vie et de revendication, une autre question se pose : par qui Olivier Dubois a-t-il été trahi ?
Centre et Nord du Mali : journalistes en danger
La plupart des journalistes maliens racontent la difficulté de continuer à informer du fait des pressions et des intimidations multiples, qui viennent du pouvoir ou d’ailleurs, sans parler du manque de moyens de la profession.
Il est désormais “quasiment impossible” de faire du terrain dans certains villages des régions du Centre et Nord du Mali.
“La vie d’un journaliste au Nord du Mali n’est pas toujours gaie, même à Bamako (relativement préservée, NDLR): barbelés autour de la maison, précautions à prendre dehors”, etc.
Au-delà des risques courus en déplacement, les journalistes locaux évoquent le sentiment d’une menace permanente. Le rédacteur en chef de la télévision privée malienne Renouveau TV, Bréhima Sogoba, rapporte que certains de ses correspondants, par crainte des représailles, renoncent à signer leurs reportages. Continuer à rapporter une information complexe dans un tel contexte est un défi constant. Pour le rédacteur en chef de Renouveau TV, il faut avant tout “maîtriser le terrain” et mesurer “tous les enjeux”. “Le bon journaliste, c’est quand même celui qui vit”, dit Bréhima Sogoba.
La Fondation des médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) s’inquiète que le Mali reste un pays dangereux pour l’exercice du journalisme. Deux journalistes de RFI, Ghislaine Dupont et Claude Verlon y ont été assassinés en 2013. Le journaliste malien, Birama Toure est porté disparu depuis 2016 dans des circonstances encore non-élucidées.
Nous appelons donc les autorités à multiplier les efforts pour assurer la sécurité des journalistes. Nous exhortons d’ailleurs les directions des organes des médias et la société civile d’organiser pour les journalistes des ateliers de formation sur la question de sécurité.