La République du Togo, à l’image d’autres pays africains s’est lancée sur la voie de la construction de l’Etat de droit, dans le sillage des vents de démocratisation du continent dans les années 1990. Plus de 30 ans après, où en est la liberté de la presse dans ce pays d’Afrique de l’Ouest ? Pour faire le point de la situation, la Fondation des médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) en collaboration avec l’Union des journalistes Indépendants du Togo (l’UJIT) a élaboré le rapport sur « L’état de la liberté des médias au Togo en 2020.
Ce rapport présente succinctement le paysage médiatique togolais ; fait le point de la législation qui encadre l’exercice de la liberté de la presse ; analyse la réalité quotidienne des médias et des professionnels des médias dans l’exercice de leurs obligations d’informer les citoyens, la sécurité des journalistes, les différentes formes de violations de la liberté de la presse, etc.
A l’instar des autres pays de l’Afrique de l’Ouest francophone, le processus de démocratisation a favorisé un boom médiatique Togo au cours des dernières décennies. En 2020, le Togo comptait environ 224 titres de journaux dont trois publics et 221 privés ; 73 radios (six radios publiques, 35 radios professionnelles, 32 radios confessionnelles et communautaires) ; neuf chaînes de télévision (la chaîne publique et 8 télévisions privées) et une centaine de médias en ligne.
Sur le plan du dispositif juridique et réglementaire, la liberté de la presse au Togo tire ses fondements de la Constitution. Suivra une batterie de textes spécifiques pour mieux encadrer ces libertés fondamentales garanties par la constitution. On peut citer entre autres :
la Loi 2009-029 du 22 décembre 2009 relative à la HAAC ; La Loi n°2020-001 du 07 janvier 2020 portant Code de la presse et de la communication. La Loi n° 2016-006 du 30 mars 2016 portant liberté d’accès à l’information et à la documentation publique et La Loi n°2019-016 du 30 octobre 2019 portant régime juridique des communications audiovisuelles entre autres.
Tout cet arsenal juridique devrait permettre une meilleure expression de la liberté de la presse. Cependant, si la libéralisation de l’espace médiatique a permis l’émergence d’une kyrielle d’organes de presse avec une diversité de lignes éditoriales, il se pose malheureusement des interrogations sur l’indépendance des médias au Togo. En effet, la plupart des médias privés sont portés par des acteurs proches des différentes obédiences politiques, toute chose qui a tendance à les polariser autour des antagonismes politiques. Cette situation a pour conséquence de dévoyer quelque peu l’exercice de la liberté de la presse et nuire aux quelques rares médias qui se battent en toute indépendance pour exercer librement le métier de journaliste. A cela s’ajoute, les fortes suspicions sur la justice et l’instance de régulation et celle d’autorégulations accusées par les professionnels d’être inféodées au pouvoir exécutif. Naturellement les actions de ces institutions sont plus perçues sous l’angle de la répression et de la violation de la liberté de la presse.
En 2020, la Haute Autorité de l’Audiovisuelle et de la communication a pratiquement fermé le journal L’Indépendant Express en retirant définitivement son récépissé et celui de son son directeur de publication. Un autre a été suspendu pour 4 mois. Les violations de la liberté de presse se traduisent également par des harcèlement judiciaires et policiers avec arrestations de journalistes dans le cadre de leur travail par la gendarmerie et des condamnations à des amendes pécuniaires élevées (4 millions de francs CFA). Une dizaine de journalistes ont été interpellés, détenus, traduits en justice, suspendus où soumis à des interrogatoires/auditions musclés. Enfin, la sécurité physique des journalistes est remise en cause par des menaces sur certains d’entre eux. Au regard de ce qui précède, l’on peut affirmer que la liberté de la presse s’exerce difficilement au Togo.
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