La Mauritanie courant 2020 perd 3 points par rapport au dernier baromètre de Reporters Sans Frontières (RSF) sur la liberté de la presse et classe le pays au rang de 97e sur 180 pays. Jadis « champion » du monde arabe dans lequel elle a occupé de 2006 à 2013, la première place, la Mauritanie dégringole au classement sur la liberté de la presse.
Ce diagnostic de RSF est indicateur du recul que connait la liberté de presse dans le pays en dépit des reformes entreprises par le gouvernement et le lancement d’un vaste chantier qui comprend notamment des réformes d’ordre juridiques, le renforcement de la professionnalisation des médias, un meilleur accès à l’information et un soutien économique plus accru aux organes de presse. En effet, la batterie de loi adopté depuis son indépendance avec la constitution de 1961 se fondant sur l’Islam comme principal élément unificateur de la société mauritanienne, et les principes de protection de l’autorité du chef de l’Etat ont créé un cadre fertile à la répression de la liberté de presse par les autorités publiques.
Harcèlement judiciaire, autocensure : Des hommes de presse et individus ont régulièrement été poursuivies pour avoir exprimé pacifiquement des opinions dissidentes et des critiques à l’égard de l’État et de ses représentants. Les journalistes et les militants des droits humains qui dénoncent les phénomènes d’exclusion ou des affaires de corruption ont souvent été victimes d’abus policiers, de harcèlement judiciaire et de détention arbitraire. Cet état des lieux souligne que des journalistes « s’autocensurent quand ils doivent couvrir » des sujets dits tabous.
Lutte pour endiguer les fausses informations : Les parlementaires en Mauritanie ont adopté en juin 2020 la « loi sur la diffusion de fausses informations » encore appelée « loi contre la manipulation de l’information » ou encore « loi fake news ». Cette loi considérée par certains observateurs comme un rempart servant à protéger la démocratie contre les diverses formes de diffusion intentionnelle de fausses informations, est pour d’autres observateurs une menace sur les libertés publiques et les droits constitutionnels. Les observateurs reprochent à la loi une certaine ambigüité et des inexactitudes relevées dans la définition des concepts utilisés, mais surtout l’existence d’une pléthore d’interprétations qui pourraient conduire à des atteintes graves aux libertés constitutionnelles, notamment la liberté d’expression. Depuis son adoption, la loi a déjà été utilisé pour sanctionner des cas de fausses informations dans le pays.
La synthèse des défis et avancés enregistrés par les médias dans l’exercice de la liberté de la presse dans le pays sont l’objet du rapport sur l’état de la liberté de presse en Mauritanie en 2020. Le présent rapport est le résultat d’une collaboration entre la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) et son partenaire national, Regroupement de la Presse Mauritanienne (RPM). Il se veut une synthèse sur la liberté de la presse et revisite les lois, les politiques et institutions régissant les médias, et fait une analyse de l’état de la liberté de la presse au Mauritanie courant 2020.