À l’échelle mondiale, les études montrent que davantage de femmes que d’hommes s’inscrivent dans des écoles de journalisme et poursuivent une carrière dans ce domaine. Cependant, ce sont leurs homologues masculins qui dominent les postes à responsabilité en matière de rédaction et de gestion dans de nombreux médias. Cette disparité entre les sexes dans les salles de rédaction explique en partie la prédominance des valeurs masculines, qui font pencher le contenu médiatique en faveur des questions relatives aux hommes, au détriment de celles relatives aux femmes.
Les facteurs qui continuent d’alimenter cette disparité entre les sexes restent essentiellement similaires, mais ont tendance à être nuancés sous l’influence de facteurs socioculturels qui diffèrent d’une région du monde à l’autre. En Afrique de l’Ouest, ces facteurs demeurent des stéréotypes culturels profondément enracinés qui présentent les femmes comme étant mieux adaptées à des rôles plus faciles à tenir dans les salles de rédaction.
Par exemple, une étude démontre qu’il existe une perception répandue selon laquelle les femmes sont mieux adaptées aux rôles glamours de présentatrices de journaux télévisés, plutôt qu’au journalisme d’investigation. Selon cette étude, à la télévision, la valeur des femmes se mesure davantage à leur physique et à leur apparence qu’à leurs compétences et à leurs qualifications.
Mais ces stéréotypes ne sont en fait que des stéréotypes, car malgré tous ces obstacles, les femmes journalistes continuent de prouver qu’elles sont parfaitement capables de répondre aux exigences du journalisme, quel qu’en soit le type ou le style. A juste titre, les expériences et les réalisations des quelques femmes journalistes qui ont brisé le plafond de verre pour occuper des postes éditoriaux et de direction dans des médias restent des exemples convaincants. Il s’agit notamment d’Ifeyinwa Omowole, rédactrice en chef de la Nigeria News Agency, de Khadija Patel, présidente de l’Institut international de la presse et ancienne rédactrice en chef du Mail & Guardian, ou de Jamila Akweley Okertchiri, première femme rédactrice en chef du Daily Guide, au Ghana.
Le thème de la Journée internationale de la femme, « Investir en faveur des femmes, accélérer le rythme », est un appel à l’action opportun. En effet, ce thème incite les acteurs des médias à faire progresser l’activisme en s’attaquant aux stéréotypes sexistes existants, qui sont source d’antagonisme pour les femmes dans les salles de rédaction. Cet appel à l’action invite les parties prenantes à se mobiliser une fois de plus et à faire avancer la cause pour que les salles de rédaction offrent aux femmes les mêmes opportunités de carrière qu’aux hommes.
Cela ne signifie pas qu’il y a eu un manque d’activisme et de progrès dans la lutte pour l’équité entre les sexes dans les salles de rédaction en Afrique de l’Ouest. En effet, nombreuses parties prenantes travaillent depuis longtemps à la lutte contre la disparité entre les sexes au moyen de diverses stratégies. À la Fondation des médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA), par exemple, l’une des stratégies est le respect d’un pourcentage d’au moins 40 % de femmes bénéficiaires lors de différents types de programmes de formation au journalisme. Le programme de bourse de formation de la prochaine génération de journalistes d’investigation (NGIJ) de la MFWA est un exemple de programme d’autonomisation dans lequel cette stratégie est appliquée.
En outre, la MFWA organise régulièrement des programmes de formation sur des questions telles que la vérification des faits, le journalisme de données et le journalisme mobile pour des bénéficiaires, dont 40 % doivent être des femmes.
Cependant, même avec des initiatives telles que celles de la MFWA, il reste encore beaucoup à faire. Les gouvernements d’Afrique de l’Ouest sont particulièrement connus pour leur lenteur à adopter des politiques d’équité entre les sexes et, même lorsqu’ils le font, leur mise en application est souvent désastreuse. Les études ont depuis longtemps confirmé que les femmes sont des catalyseurs du développement. Cette attitude peu enthousiaste des gouvernements doit donc changer sur tous les plans, y compris dans l’adoption et la mise en œuvre de politiques qui créent l’équité pour les femmes dans tous les aspects de la chaîne de valeur macroéconomique et microéconomique.
Les gouvernements ne devraient pas seulement mettre en œuvre des politiques d’équité entre les sexes, mais devraient également montrer qu’ils les appliquent, car de telles actions de la part des gouvernements contribuent à sensibiliser les citoyens à la nécessité de l’équité entre les sexes.
La société civile doit être félicitée pour les années d’investissement et d’activisme en faveur de la parité hommes-femmes en Afrique de l’Ouest, mais le thème de la commémoration de la Journée internationale des femmes de cette année est un nouvel appel aux OSC à ne pas se laisser abattre et à renouveler leur engagement en faveur de la cause de l’égalité hommes-femmes.
Cette commémoration devrait encourager les médias à s’efforcer de rendre les salles de rédaction plus équitables, tandis que pour les femmes journalistes elles-mêmes, le défi consiste à réaffirmer leur valeur en tant que journalistes aussi compétentes que leurs homologues masculins.
Par ailleurs, l’appel à l’action devrait également être considéré comme un défi lancé à la CEDEAO pour qu’elle fasse davantage pour l’amélioration des droits des femmes. À cet égard, il est impératif de promouvoir de manière plus agressive le traité de la CEDEAO pour l’égalité des sexes, en vertu de l’article 63.