La Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) est préoccupée par les troubles politiques que subit le Burkina Faso suite à un deuxième coup d’état dans le pays huit mois seulement après le premier, et appelle les nouveaux dirigeants à respecter la liberté de la presse, la liberté d’expression et les droits humains en général.
Un groupe d’officiers de l’armée a pris le contrôle de la télévision d’État le 30 septembre 2022 et a annoncé le renversement du chef militaire Paul-Henri Damiba. La prise d’assaut des locaux du radiodiffuseur national a brièvement perturbé ses programmes réguliers.
Dans un communiqué lu par le capitaine Ibrahim Traoré, le groupe a annoncé qu’il avait dissous le gouvernement, suspendu la constitution et la charte de transition. Il a également annoncé la fermeture des frontières du pays jusqu’à nouvel ordre ainsi que la suspension de toutes les activités politiques et de la société civile.
Nous regrettons profondément la suspension des activités politiques et de la société civile par les nouveaux dirigeants entrainant ainsi une fermeture complète de l’espace civique au Burkina Faso. Cette mesure, couplée à la suspension de la charte de la transition, constitue un revers majeur pour les efforts nationaux et internationaux visant à restaurer l’ordre constitutionnel dans le pays.
Le Burkina Faso est déjà en proie à une insécurité et une instabilité critique dues à l’insurrection djihadiste et aux coups d’État militaires. Le pays a subi l’une de ses attaques terroristes les plus meurtrières une semaine avant la dernière intervention militaire. Environ 11 soldats ont été tués et plus de 50 civils ont été portés disparus lors de cet assaut.
Le renversement du colonel Paul-Henri Damiba est le deuxième coup d’État militaire dans le pays en huit mois. Le chef militaire déchu a pris le pouvoir en janvier des mains de Roch Marc Christian Kabore qui était dans la deuxième année de son second mandat en tant que président élu.
Ce coup d’État est le dernier en date d’une série de prises de pouvoir militaires en Afrique de l’Ouest, et s’ajoute à ce qui est malheureusement considéré comme la plus grande régression en termes de démocratie dans la sous-région au cours des deux dernières décennies. Deux coups d’État militaires ont eu lieu au Mali, tandis que le président guinéen Alpha Condé a été renversé par ses gardes du corps en septembre 2021.
En tant qu’organisation qui promeut la liberté de la presse en Afrique de l’Ouest, la MFWA trouve la recul démocratique dans la région assez inquiétante. L’environnement de la liberté d’expression s’est détérioré dans ces pays avec une autocensure généralisée, notamment au Mali et au Burkina Faso. En Guinée, l’espace civique a été fermé. Les processions publiques de groupements politiques et sociaux ont été interdites. Plusieurs manifestants intrépides ont été battus, arrêtés et tués au cours des deux derniers mois. Les militaires ont convoqué et interrogé un certain nombre de journalistes, tandis que l’organisme de régulation des médias a suspendu une douzaine de journalistes critiques et quelques organisations médiatiques.
Compte tenu des faits mentionnés en amont, nous exhortons les nouveaux dirigeants militaires du Burkina Faso à dialoguer avec les dirigeants des médias, en reconnaissance du rôle essentiel qu’ils peuvent jouer dans l’effort national visant à rétablir la paix, la stabilité et l’ordre constitutionnel dans le pays.