Par Sulemana Braimah, Directeur Exécutif de la Foundation des Médias d’Afrique de l’Ouest
Il y a 25 ans depuis que le Ghana a renoué avec le régime démocratique sous la Constitution de la Quatrième République, devenue opérationnelle en 1993. La Constitution contient des dispositions élaborées sur les droits de l’homme. En particulier, le chapitre 12 de la Constitution, contient des dispositions progressistes pour l’indépendance des médias et les libertés.
Depuis l’entrée en vigueur de l’actuelle Constitution, le paysage des médias au Ghana a vu des changements importants. Dans le secteur de l’audiovisuel par exemple, il y a une augmentation importante du nombre d’organes des médias, diversité des promoteurs, diversité dans les types et formes des médias, et répartition des organes des médias à travers le pays.
Avant 1993, il n’y avait que l’unique chaine audiovisuelle d’Etat, contrôlée par le gouvernement et qui opérait le réseau du Service de Diffusion Audiovisuel du Ghana (Ghana Broadcasting Corporation(GBC). 25 ans après, la GBC n’a pas été seulement destituée de sa monopole, mais aussi privé maintenant de son influence dans le secteur de l’audiovisuel.
Les derniers chiffres disponibles de l’Autorité Nationales des Communications (National Communications Authority (NCA) indique que 367 stations de radio sont opérationnelles dans le pays en Septembre 2017. Ce chiffre est déduit des 471 autorisations qui ont été accordées par l’autorité. Pour les télévisions, les données de la NCA montrent qu’en Juin 2016, 34 stations étaient opérationnelles. Ces chiffres auraient augmenté actuellement.
En ce qui concerne la presse écrite, même s’il y avait un nombre considérable de publications outre les journaux d’Etat Ghanaian Times et Daily Graphic, le nombre de journaux et de magazines dans le pays a aussi augmenté considérablement.
L’espace des médias en ligne est en train de bourdonner avec des changements importants. Selon le site des données mondiales numériques et de la population Internet World Stats, il y avait près de 30 000 utilisateurs d’internet au Ghana en 2000. En 2017, le nombre a atteint 10,1 millions.
La pénétration et l’accès croissant à l’internet et aux téléphones mobiles a aidé la croissance des technologies des médias. Il y a actuellement des dizaines de site d’informations, des centaines de blogs personnels et des dizaines d’applications d’optimisations et de partages d’informations.
Les nouvelles technologies des médias, particulièrement les sites des réseaux sociaux tels que Facebook, Twitter offrent des opportunités illimités pour générer des informations participatives au public et des informations personnelles par des soi-disant journalistes citoyens. A la fin de l’année 2017 par exemple, ils étaient 4,9 millions d’abonnés de Facebook au Ghana.
Par-dessus tout, il apparait donc qu’il y a une relation de symbiose entre l’évolution graduelle de la culture démocratique du Ghana et l’expansion du secteur des médias.
Malgré l’expansion en nombre, la diversité des promoteurs, le pluralisme et l’expansion des organes des médias à travers le pays durant les 25 dernières années, tout n’est pas rose dans le secteur des médias ghanéens. Des lacunes majeures ont émergés; l’organe principal de régulation est devenu léthargique, le respect des standards professionnels est en déclin, les conditions de sureté des journalistes sont dégradantes, et les organes des médias continuent de lutter pour leur survie.
Donc après 25 ans, le secteur des médias au Ghana requiert des réformes majeures qui aideront à renforcer les médias à jouer leurs rôles cruciaux dans le développement national. Ci-dessous, dans un ordre non particulier, quelques-uns des domaines qui exigent des réformes majeures et l’attention dans le secteur des médias ghanéens:
Reformes de Régulations: les reformes de régulations sont particulièrement nécessaires pour le secteur de l’audiovisuel. A ce stade, le pays a besoin désespérément d’une loi sur l’audiovisuel pour régulariser et assainir le secteur. Les processus de migration numériques en cours exige qu’une loi sur l’audiovisuel soit adoptée.
L’absence d’une loi sur l’audiovisuelle au cours des années passées a fait que le secteur est exposé à un certain nombre de défis et d’abus. Ceci inclut les manipulations dans l’attribution des fréquences, des conditions d’abus d’attribution des licences, manque de transparence sur les promoteurs des medias, concentration des promoteurs, et une compétition injuste vis-à-vis des stations basées dans les milieux ruraux et communautaires.
Reformes de la Commission Nationale des Medias: Le but et la vision qui ont soutenu la création de la Commission Nationale des Medias (NMC) étaient nobles et progressistes. Au cours des années, la Commission a peut-être joué un rôle critique en donnant plein effet à l’exigence constitutionnelle pour l’isolement et l’indépendance des médias d’Etat.
Cependant, 25 ans après, il y a un besoin urgent d’entamer un processus de réforme de la NMC pour la rendre plus déterminée et utile au cours des années à venir.
La NMC devrait-elle continuer d’avoir le nombre colossal de membres payés par l’Etat ? La Commission ne devrait–elle pas maintenant avoir le pouvoir d’imposer des sanctions aux médias récalcitrants ? La Commission ne devrait-elle pas publier des rapports annuels de ses activités comme moyen de rendre compte au public ? La Commission devrait-elle toujours être en train de nommer les directeurs des medias d’Etat ou cela devrait-elle être la fonction du conseil d’administration comme constituée par la Commission ? Voilà quelques-unes des questions et bien d’autres qui méritent d’être prises en compte à travers un processus de réforme.
Transformation du GBC: GBC a joué un rôle majeur dans le développement du Ghana, particulièrement avant l’adoption de la présente constitution et au début des années de la quatrième république. 25 ans après, une combinaison toxique de mauvaise administration, d’ingérence politique, une faible supervision et la culture du zèle excessif de ″syndicalisme″ a fait que la GBC est pratiquement sans importance dans le secteur de l’audiovisuel.
Il y a toujours eu des débats à propos d’un besoin de transformer complètement la GBC en un vrai service public d’audiovisuel qui soit financé de façon transparente par le public et tenu à rendre compte au public. Le moment de le faire, c’est maintenant. Tout autre retard ne pourrait qu’empirer les maux du jadis dynamique audiovisuel d’Etat.
Durabilité des Médias: A travers le monde, la durabilité des organes des médias privés est l’un des défis majeurs. Le cas au Ghana n’est pas différent. Les organisations des médias luttent pour demeurer financièrement viable et durable. Diffèrent modelé d’affaires ont été testés et sont entre train d’être testés et aucune n’a été trouvé détenir la magie pour changer les choses autour de l’entreprise des médias.
La situation au Ghana, a l’instar d’autre pays en voie de développement, est empiré par la prise des revenues des publicités en ligne par les géants mondiaux des médias numériques, en particulier Google et Facebook. Outre cela, la technologie a fait qu’il est possible pour les audiences locales d’avoir accès au contenu des médias géants traditionnels basés en Europe qui sont plus disposés à investir davantage dans la production des contenus de qualité.
Comme résultat, les médias au Ghana, comme dans d’autres pays en voie de développement, ont toujours recours à, et se focalisent sur ce qui peut simplement leur donner plus de clics, plus d’auditeurs et de téléspectateurs, du sensationnalisme, des informations des vedettes, des rumeurs, entre autres.
En d’autres mots, ce qui se passe est ce qu’une publication récente du Centre for Media Assistance (CIMA) basé aux Etats Unis a décrit dans une publication comme ″festin des médias et pénurie d’informations″. Cette tendance est en train de réduire sans cesse la confiance, la crédibilité et l’importance des médias ghanéens. En tant qu’une nation, nous avons besoin d’amorcer une discussion à propos de la durabilité des médias.
Capacité des Médias et Professionnalisme: Un autre domaine qui requiert d’attention est le bas niveau des standards professionnels et les lacunes de capacité générale des médias. Au cours des années, beaucoup de ressources ont été allouées aux renforcements des capacités des journalistes. Les résultats n’ont pas été assez impressionnants. Il y a donc un besoin de rechercher de nouveaux modèles et stratégies de renforcement de capacités. Les écoles de journalisme ont besoin aussi de commencer par modifier et adapter leurs programmes d’enseignement traditionnels basés sur les théories aux exigences du journalisme contemporain.
C’est seulement lorsque les journalistes sont plus professionnels que les médias peuvent jouer leurs rôles cruciaux dans la société. Et, ceci est le seul moyen par lequel les médias peuvent regagner la confiance, la confidence et le soutien du public.
Sécurité et Bien-être des Journalistes: La sécurité des journalistes est cruciale autant que le travail qu’ils font. Malheureusement, les conditions de sécurité des journalistes au Ghana se sont détériorées au cours de ces derniers temps. Ceci est particulièrement lié aux conditions générales dans lesquelles les journalistes travaillent. Les journalistes sont parmi les travailleurs les plus mal payés dans le pays. Il est temps de porter un regard critique à la fois aux conditions de sécurité des journalistes et les conditions générales de travail des journalistes ghanéens.