La Haute Autorité de la Communication (HAC), régulateur des médias en Guinée, a suspendu le journaliste Toumany Camara et son site d’information, www.presseinvestigation.com, pour une durée de trois mois, suite à des accusations de diffamation.
Selon la HAC, les sanctions ont été prises conformément aux articles 39, 40, 53 et 108 de la loi organique L/2010/02/CNT du 2 juin 2010 sur la liberté de la presse. Les sanctions font suite à une plainte déposée par Mme Aïssata Beavogui, directrice nationale de la société minière Predictive Discovery. Elle a accusé Camara de « diffamation et d’insulte à travers les médias en ligne ».
Le 28 avril 2025, la HAC a suspendu le site d’information pour trois mois et a retiré la carte de presse de Camara pour la même durée, lui interdisant d’exercer le journalisme jusqu’au 28 juillet 2025.
Dans l’article au centre du litige, Camara a rapporté que Mme Beavogui – ancienne directrice générale de Guinea Alumina Corporation (GAC), une société qui aurait été fermée par les autorités guinéennes pour non-conformité – avait été nommée directrice nationale de Predictive Discovery, une société qui chercherait à obtenir un permis d’exploitation de mines d’or dans le parc national du Haut Niger protégé par l’UNESCO. L’article fait état de risques potentiels de non-conformité pour l’entreprise et de risques environnementaux significatifs si l’exploitation minière est autorisée dans le parc.
L’enquête de Camara met en lumière la grave menace qui pèse sur l’écosystème fragile du parc, qui abrite des espèces menacées et sert de source au fleuve Niger. En tant que plus grande réserve naturelle de Guinée et priorité de conservation pour la sous-région ouest-africaine, le parc joue un rôle écologique vital qui pourrait être mis en péril par les opérations d’extraction.
À l’issue d’une audience, la HAC a conclu que M. Camara n’avait pas fourni de preuves à l’appui de ses allégations à l’encontre de Mme Beavogui et qu’il avait omis de donner à cette dernière la possibilité de répondre à ces allégations. Sur cette base, l’autorité de régulation a pris des sanctions distinctes à l’encontre du journaliste et de son site web.
Le Syndicat des professionnels de la presse guinéenne (SPPG) a rejeté la décision de la Haute Autorité de la Communication (HAC), la qualifiant d’« injuste, arbitraire et dangereuse ».
Selon les médias, le secrétaire général du syndicat a défendu l’article de M. Camara, citant sa pertinence pour l’intérêt public. “Lorsque Toumany a reçu la convocation de la HAC, il m’a contacté. J’ai lu l’article. Honnêtement, c’est un article d’intérêt public qui alerte sur les risques environnementaux liés à l’exploitation d’une zone tampon dans le parc national du Haut-Niger, une zone protégée par l’UNESCO. C’est une question de santé publique, d’intérêt général”, a-t-il déclaré.
La MFWA partage l’avis de la SPPG selon lequel l’article de Camara est un rapport d’intérêt public qui souligne et met en garde contre les crises environnementales qui pourraient résulter de l’exploitation de la zone de réserve. Nous demandons donc à la HAC de dialoguer avec le SPPG sur les questions soulevées et de reconsidérer les sanctions infligées au journaliste et à son site web. Nous exhortons également les journalistes à respecter en permanence les normes éthiques les plus strictes et à veiller à ce que toutes les parties soient équitablement représentées dans leurs reportages.