La Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) se félicite de la libération de Pape Malick Thiam, journaliste de la chaîne de télévision privée 7TV, qui a été arrêté après une altercation avec un agent de sécurité au tribunal de Dakar.
La MFWA exhorte les autorités sénégalaises à protéger les droits des professionnels des médias et à préserver la liberté de la presse.
Le 14 Avril 2022, Pape Malick Thiam, journaliste de 29 ans s’est rendu au tribunal de Dakar pour couvrir une audience qui s’inscrivait dans le cadre d’une affaire présumée de viol entre Adji sarr et l’opposant politique Ousmane Sonko. Alors qu’il était au palais de justice de Dakar, le journaliste a été interpelé par un gendarme, qui l’avait accusé de faire des d’enregistrements dans une zone d’accès restreinte.
Thiam a reçu l’injonction de céder son appareil, mais s’y est opposé. Il se débattait pour ne pas avoir son téléphone saisi par l’agent de sécurité lorsqu’il a été molesté et roué de coups jusqu’à en défaillir. Accusé « d’outrage à agent public », il est par la suite arrêté et placé en garde à vue, où il reprendra connaissance.
Selon le code pénal du Sénégal, le délit dont est accusé Pape Malick Thiam est passible d’une peine d’emprisonnement de trois mois et d’une amende de 50.000 francs CFA.
Au bout de 24 heures de détention, le journaliste a pu récupérer son téléphone et bénéficier d’une liberté provisoire, mais seulement après avoir été contraint de signer un procès-verbal qu’il n’a jamais eu le temps de lire.
Le journaliste a été jugé le 20 avril 2022 pour les délits de rébellion et d’outrage à agent publique dans l’exercice de ses fonctions. Thiam a plaidé non coupable et a nié les charges portées contre lui. Ses avocats ont quant à eux plaidé la clémence du parquet afin que leur client soit dispensé de peine. Le journaliste a par conséquent été exempté de l’emprisonnement.
Cette absolution, même si elle signifie que le prévenu est libre, elle n’efface pas pour autant le fait qu’il ait été reconnu coupable. En effet, le juge a déclaré Pape Malick Thiam coupable des charges avant de lui accorder une dispense de peine.
Cet incident n’a pas été sans répercussion sur Pape Malick Thiam. Au cours d’un échange téléphonique que ce dernier a tenu avec la MFWA, il se disait profondément touché. « Vous vous dites que tout n’est pas réuni pour avoir dans ce pays une presse libre détachée de toutes tracasseries » a-t-il expliqué.
« On ne peut rien faire. On est déboussolé…J’espère qu’aucun autre journaliste n’aura plus à vivre ce sentiment », il poursuit en disant qu’il s’agit d’un évènement « plein de tristesse parce que c’est une expérience que je n’aurai jamais dû connaitre dans ma carrière. Plein de regrets aussi parce que venir jusqu’à avoir des problèmes pour un journaliste avec des forces de l’ordre, c’est déplorable. »
Toutefois, le journaliste salue la décision de la cour qu’il qualifie de « salutaire, sage et respectable ».
Pape Malick Thiam, ne compte pas déposer de contre-plainte, mais il compte plutôt enterrer la hache de guerre et apaiser les tensions éventuelles.
« Pour moi, le plus important, c’était de recouvrer ma liberté d’esprit et de mouvement…j’ai été acquitté de toutes peines ; pas de sursis ni amendes. Donc, cela me conforte dans ma démarche en tant que journaliste…Une plainte contre les agresseurs ravivera que davantage la situation…Alors, je pense qu’il est important d’enterrer la hache de guerre, » souligne-t-il.
La MFWA se réjouit de l’issue de cet incident mais estime que le traitement infligé à Pape Malick Thiam a été inapproprié, voire excessif. Nous condamnons fermement le fait que ses droits aient été violés à plusieurs reprises. Son téléphone a été saisi, ce qui porte atteinte à son droit à la vie privée et pourrait compromettre son contenu. Il a été battu jusqu’à en perdre connaissance, détenu et, par-dessus tout, jugé pour des faits qui n’auraient dû prendre cette tournure.
Alors que nous invitons les journalistes à faire preuve de professionnalisme et de prudence, nous tenons à rappeler aux autorités sénégalaises que la liberté d’expression et de la presse ne doivent en aucun cas être réprimées ou aliénées. Par conséquent, nous exhortons les autorités du Sénégal à sanctionner les responsables de ces actes tout en promouvant un environnement paisible et propice à l’exercice du journalisme.