La Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) condamne fermement les menaces de mort par des inconnus à l’encontre du journaliste Inoussa Ouédraogo, et appelle les autorités burkinabè à mettre tout en œuvre pour appréhender et juger les coupables.
« Il faut que tu fasses très attention ; cesse de te mêler de ce qui ne te regarde pas. Tu penses que tu es caché, mais nous on sait où tu vis », un expéditeur anonyme a menacé en langue locale du Burkina Faso dans un message vocal que Inoussa Ouédraogo a traduit à la MFWA.
Ouédraogo est à la tête de l’influente Société des éditeurs de la presse privée (SEP). Il est également membre du Comité de pilotage du Centre national de presse Norbert Zongo (CNP-NZ). Des individus ont stationné devant son domicile dans la nuit du 13 août 2023 pour observer sa cour. En outre, des enregistrements audio porteurs de menaces de mort ont également été adressés à des membres de la famille du journaliste. Les auteurs de ces menaces ont clairement indiqué que celles-ci étaient liées à ses analyses critiques contre le président de la Transition, le Capitaine Ibrahim Traoré, lors de ses participations médiatiques.
Les menaces contre M. Ouédraogo se sont intensifiées après qu’il a représenté les Organisations professionnelles des médias (OPM) à l’émission « 7 Infos » de la Télévision BF1 le 13 août 2023, où il a fermement dénoncé le caractère illégal et arbitraire de Radio Oméga par le gouvernement.
Les OPM ont vivement condamné les menaces contre Ouédraogo et ont estimé que les menaces contre leur représentant, constituent également des menaces contre elles. Dans un communiqué publié le 29 aout 2023, les OPM ont appelé les autorités compétentes à prendre des mesures urgentes pour assurer la sécurité de Inoussa Ouédraogo et de sa famille.
Inoussa Ouédraogo a confié à la MFWA au cours d’une conversation téléphonique qu’il a saisi ont également exhorté le Procureur du Faso à ouvrir une enquête diligente pour identifier et traduire en justice les auteurs de ces menaces, ainsi que leurs commanditaires.
Les menaces ont également été signalées à la Commission Nationale des Droits Humains du Burkina Faso.
« Je ne suis pas dans les conditions psychologiques pour travailler. J’avoue que les nuits, je ne peux pas dormir tranquille. On ne sait pas à quel degré ces personnes sont engagé ; je ne prends rien à la légère. J’essaie de mettre à l’abri moi et ma famille », M. Ouédraogo a affirmé à la MFWA.
Les menaces contre M. Ouédraogo s’inscrivent dans une série de menaces et d’intimidations à l’encontre des médias et des journalistes au Burkina Faso. Plusieurs autres journalistes ont également fait cas de menaces à leur encontre. Il s’agit notamment des journalistes Ladji Yacouba Bama, Sery Baoula, Siriki Dramé, Lionel Bilgo, Bassolma Bazié, et du Dr Daouda Diallo. Newton Ahmed Barry et Alpha Barry ont également déclaré avoir reçu des menaces ces derniers temps. Dans l’un des cas, l’auteur des menaces a été jugé et condamné.
Yacouba Ladji Bama, directeur de publication du site d’information d’investigation Bamyinga, a déclaré à la MFWA qu’il avait reçu des menaces de mort sur Facebook la semaine dernière.
« Tous ceux qui tentent d’être critiques vis-à-vis de la transition subiront le même sort », a déclaré le journaliste d’investigation a la MFWA.
En juillet 2023, Ismaël Ouédraogo, journaliste, Directeur général de la télévision Burkina info TV, a fait l’objet de menaces et d’injures suite à un éditorial sur un projet de référendum constitutionnel.
Le MFWA est extrêmement préoccupé par ces menaces de mort et ces intimidations répétées, qui portent manifestement atteinte aux droits à la liberté de la presse et à la liberté d’expression. Ces événements illustrent la situation préoccupante dans laquelle se trouvent les journalistes et les voix critiques au Burkina Faso.
Force est de constater que la plupart des menaces enregistrées visent des journalistes et des activistes et font souvent suite à des critiques des victimes à l’égard du gouvernement. Par conséquent, il importe que les autorités réévaluent leur attitude à l’égard des médias en faisant preuve d’une plus grande tolérance à l’égard des opinions divergentes afin de désarmer leurs admirateurs belliqueux. Nous demandons également au gouvernement de condamner publiquement et de désavouer les fanatiques qui attaquent ou menacent les journalistes sous prétexte de défendre la junte.