Guinée: Ouverture d’une enquête sur l’enlèvement et la torture de Me Mohamed Traoré

La Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) salue de la déclaration du bureau du Procureur général annonçant l’ouverture d’une enquête sur l’enlèvement et la torture de l’avocat et ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats de Guinée, Mohamed Traoré.

Dans la nuit du 20 au 21 juin 2025, Traoré a été enlevé par des individus non identifiés, violemment agressé puis abandonné à Coyah, une ville située à environ 50 kilomètres de Conakry. Il a ensuite été retrouvé et transporté d’urgence à l’hôpital pour y recevoir des soins.

Dans un communiqué public en date du 23 juin, Traoré a annoncé qu’il se retirerait provisoirement de ses activités professionnelles, évoquant les risques encourus par ses proches :

« Je voudrais faire une pause – j’insiste sur le mot pause – par respect pour ma famille et mes amis qui insistent pour que je fasse comme tout le monde. Ils diront sûrement : voilà, il a compris l’avertissement. Mais, je les laisse dans leurs illusions. La vérité est qu’en voyant mes enfants pleurer et ma fille aînée giflée par un de mes ravisseurs qui n’a pas pensé un seul instant qu’il pouvait avoir une fille du même âge, j’ai compris que je les mettais en danger sans qu’ils n’aient eux-mêmes cherché cela. »

Le même jour, l’Ordre des avocats de Guinée a tenu une assemblée générale extraordinaire à la Cour d’appel de Conakry. À l’issue de cette réunion, les avocats ont décidé de suspendre pendant deux semaines leur participation à toutes les audiences et convocations policières à travers le pays. Ils ont également annoncé le retrait de leurs représentants de tous les organes de la transition, notamment du Conseil national de la transition (CNT).

En réponse, le bureau du Procureur général a annoncé l’ouverture d’une enquête judiciaire sur l’affaire Traoré. Il a également pris acte des résolutions adoptées par l’Ordre et réaffirmé son engagement en faveur du dialogue ainsi que sa disponibilité à recevoir une délégation du barreau.

Le bureau du Procureur général a par ailleurs appelé à l’unité et au strict respect des procédures judiciaires face aux préoccupations soulevées. Il a réitéré son engagement à mener pleinement les investigations et à garantir la sécurité de tous les membres du système judiciaire, dans le strict respect de l’État de droit et du principe d’indépendance de la justice.

La MFWA salue la forte démonstration de solidarité de l’Ordre des avocats de Guinée envers Traoré, qui a permis le déclenchement des enquêtes. Nous nous réjouissons également des mesures prises par le bureau du Procureur général pour que justice soit rendue.

Cependant, tout en saluant les actions de l’Ordre des avocats et du Parquet, la MFWA estime que cet élan de solidarité, cette exigence de reddition de comptes et et la réponse publique du Procureur général ne doivent pas se limiter aux seuls membres du Barreau, mais s’étendre à l’ensemble de la population guinéenne.

Si les différentes parties prenantes du pays se mobilisent face au régime et exigent des comptes pour chaque avocat, journaliste, activiste ou commentateur social victime d’atteintes, le droit à la liberté d’expression sera constamment respecté et plus personne n’aura à subir le sort réservé à maître Traoré pour avoir simplement exprimé ses opinions sur des questions d’intérêt en Guinée. Une telle mobilisation et ses conséquences positives constituent un modèle pour les autres pays de la région.

La MFWA suivra de près l’évolution de l’enquête et espère que les auteurs seront traduits en justice.

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