Le 29 Août 2019, des stations de radio privées en Guinée ont diffusé en synergie une émission de deux heures pour dénoncer les intimidations et les récents abus sur les journalistes par la police et la justice.
Des directeurs de médias, des journalistes et un avocat ont formé le panel de l’émission qui a été relayée par toutes les stations de radio et sites web d’information à travers le pays, avec de nombreux tweets de professionnels des médias et de militants de la liberté de la presse en Guinée.
“Aujourd’hui, la presse guinéenne traverse une période très difficile car les journalistes sont victimes de harcèlement et de persécutions judiciaires parce que les juges ou les procureurs ont décidé d’utiliser la loi 002 sur la cyber sécurité au lieu de la loi 003 sur la liberté de la presse, chaque fois qu’une infraction est commise, se plaint Amadou Tam Camara, président de l’AGUIPEL (Association des médias en ligne guinéens).
L’émission de protestation était la deuxième manifestation de colère contre les récents actes d’intimidation à l’encontre des médias dans le pays. Le 26 Août 2019, des professionnels des médias privés ont pris d’assaut les locaux de la Haute Autorité de la Communication (HAC), où ils ont tenu un sit-in pour exprimer leur colère devant la vague d’arrestations, de détentions et de convocations intimidantes de journalistes.
Chantant des slogans tels que “Reprenons notre liberté”, “Système judiciaire corrompu” et “Juges pétrifiés”, entre autres, les journalistes ont dénoncé leurs agresseurs et appelé le HAC à assumer sa responsabilité constitutionnelle pour protéger les médias et les journalistes.
Boubacar Algassimou Diallo, présentateur radio chez Lynx FM, est la dernière victime de la campagne de harcèlement. Il est sous contrôle judiciaire dans l’attente d’un procès pour “complicité de diffamation et atteinte à la sécurité nationale” aux côtés de Souleymane Diallo, fondateur de ladite chaîne. Toutefois, le fondateur a vu son contrôle judiciaire levé le 29 Août 2019.
Lansana Camara, rédacteur en chef du site d’information conakrylive.info, avait été arrêtée le 26 Mars sur ordre du ministre des Affaires étrangères. Le journaliste a passé huit jours en détention et fait toujours objet de poursuites pour diffamation.
Habib Marouane Kamara, journaliste à Nostalgie FM, a également été traîné devant un juge pour diffamation le 10 Juillet, après qu’Aboubacar Makissa Camara, directeur du département national des impôts de Guinée, se soit plaint d’une publication du journaliste sur Facebook.
Mohamed Bangoura, directeur de la publication du site d’information mosaiqueguinee.com, avait été convoqué au Département des investigations criminelles de la police et interrogé pendant cinq heures pour avoir publié un article issu de l’opposition. Depuis, Bangoura est poursuivi en justice pour outrage au chef de l’Etat.
La MFWA est solidaire avec les médias guinéens dans leur lutte pour la reconquête de leur liberté, garantie par la constitution nationale. Bien que nous ne tolérions pas le journalisme non professionnel, nous sommes également profondément préoccupés par le harcèlement en série des journalistes par le biais de poursuites et d’accusations frivoles en vertu du Code criminel plutôt que par le code de la presse favorable aux médias.
La Guinée s’apprête à tenir des élections l’année prochaine et le moins que les acteurs étatiques puissent faire est de collaborer avec les médias pour assurer une information et une éducation efficaces des citoyens afin de mener des élections réussies et pacifiques.