La Haute Autorité de la Communication (HAC) du Mali a décidé de retirer la licence d’exploitation de la chaîne privée Joliba TV News, sanction prise suite à la plainte du Conseil Supérieur de la Communication (CSC), du Burkina Faso.
La direction de la chaine privée malienne a été notifiée le jeudi 21 novembre 2024 de la décision qui deviendra effective dès le 26 novembre. La chaîne dispose cependant de trois jours pour contester cette décision devant la Cour suprême.
Pour rappel, le CSC a demandé, dans un courrier daté du 12 novembre, à son homologue malien de prendre les mesures qu’il juge appropriées à l’encontre de Joliba TV News, accusée par les autorités burkinabè d’avoir jeté le discrédit sur le gouvernement burkinabé. L’accusation était en lien avec une émission sur Joliba TV News au cours de laquelle un chroniqueur, Issa Kaou N’Djim, a exprimé le doute sur la communication officielle concernant une affaire de tentative de coup d’Etat au Burkina Faso.
N’Djim est incarcéré depuis le 13 novembre 2024 et son procès prévu pour le 23 décembre 2024.
Après avoir convoqué Joliba TV News, la HAC vient donc de prendre sa décision : la licence de la chaîne est retirée, et sa fermeture prononcée. La décision soulève de nombreuses questions, non seulement sur le bien-fondé des accusations portées contre Joliba TV News, mais aussi sur l’état de la liberté d’expression au Mali.
Quand la régulation devient censure
Si la HAC justifie son acte comme une régulation nécessaire, il est difficile de ne pas y voir une forme de répression contre une voix médiatique qui, jusque-là, faisait preuve d’indépendance. Bien que les débats animés par Joliba TV News aient parfois suscité la controverse, il est difficile d’accepter que cela suffise à justifier une sanction aussi radicale. Il n’est pas difficile de voir comment cette sanction incite les médias du Burkina Faso et du Mali à s’autocensurer.
La liberté de la presse est pourtant un pilier essentiel de toute démocratie. Elle offre un espace de dialogue, même sur des sujets sensibles, et permet aux citoyens de se forger une opinion éclairée.
Un précédent dangereux pour la coopération régionale
Au-delà des frontières maliennes, cette affaire pourrait avoir des répercussions sur les relations diplomatiques et médiatiques en Afrique de l’Ouest. La plainte du CSC du Burkina Faso, bien qu’internationale, a trouvé un écho immédiat auprès de la HAC. Cette réaction rapide soulève des questions quant à savoir si les autorités maliennes ont agi sous pression extérieure.
Ce précédent pourrait encourager d’autres pays à solliciter des sanctions contre des médias critiques ou indépendants, minant ainsi l’esprit de coopération et d’échange qui devrait prévaloir entre nations partageant une histoire et un avenir communs.
La Maison de la Presse demande une révocation de la sanction
Au lendemain de la décision de retirer la licence à la télévision privée, le président de la maison de la presse, Bandiougou Danté, a annoncé la décision des responsables de faîtières d’entamer des négociations avec la HAC afin d’amener le régulateur à revenir sur sa décision qualifiée de “radicale”.
La Fondation des médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) est préoccupée par la sanction controversée prononcée contre Joliba TV News et se joint à son partenaire du Mali, La Maison de la presse, pour demander l’annulation de la décision de retirer la licence de la chaine de télévision. Nous appelons aussi les autorités maliennes à remettre en liberté le chroniqueur Issa Kaou N’Djim, et à abandonner toutes les charges retenues contre lui.