Le 2 avril 2025, une vidéo montrant trois journalistes burkinabés disparus a suscité des inquiétudes quant à leur enrôlement illégal par la junte militaire et leur déploiement sur un front de guerre.
En effet, dans la vidéo, Guezouma Sanogo, Boukari Ouoba et Luc Pagbelguem apparaissent vêtus d’uniformes militaires à l’issue de ce qui semblerait être une opération réussie de l’armée burkinabé.
Les trois hommes avaient été enlevés de force et porté disparu pendant 10 jours avant de réapparaître soudainement dans la vidéo qui circule depuis sur Internet.
Sanogo et Ouoba sont respectivement président et vice-président de l’Association des journalistes du Burkina Faso, tandis que Pagbelguem est journaliste à la chaîne de télévision privée BF1.
Le 24 mars, les autorités ont arrêté Sanogo et Ouoba pour avoir prétendument dénoncé les restrictions à la liberté d’expression imposées par la junte militaire.
Après l’arrestation, les familles et les avocats des journalistes ont demandé des informations sur le lieu où ils se trouvaient, mais ils n’ont pas été entendus.
Si beaucoup redoutent qu’ils aient été enrôlés illégalement, c’est parce que ce n’est pas le premier cas d’enrôlement forcé dans le pays. En octobre 2024, les autorités burkinabés ont reconnu avoir enrôlé trois journalistes dans l’armée, quatre mois après leur disparition. Les journalistes Serge Oulon, Adama Bayala et Kalifara Séré avaient été enlevés en juin 2024, sans qu’aucune communication officielle n’ait été faite sur leur sort.
Comme l’a indiqué Human Rights Watch, « les autorités du Burkina Faso ont utilisé une loi d’urgence d’une vaste portée et un décret de “mobilisation générale”, qui s’inscrivent dans leur stratégie de lutte contre les groupes armés islamistes, afin d’enrôler dans l’armée les détracteurs de la junte, les journalistes, les militants de la société civile et les magistrats et de les réduire au silence ».
Même si la loi autorise le gouvernement à enrôler des civils, pour la défense nationale, la conscription ne devrait avoir lieu qu’avec l’autorisation de la loi.
Cette dernière conscription présumée est pour le moins condamnable. La Fondation pour les Médias en Afrique de l’Ouest (MFWA) appelle donc les autorités du Burkina Faso à reconsidérer leur décision et à permettre aux trois journalistes de retrouver leur famille et leur travail.