Dans cet article, Prosper Midedzi, l’un des stagiaires de la première promotion du stage de formation de la nouvelle génération de journalistes d’investigation, nous fait part de son expérience au cours de ce programme intensif de cinq mois.
À peine trois semaines après avoir passé mon examen de fin d’études à Central University, j’ai reçu un message WhatsApp.
Ce message était laconique. Il disait : « Prosper, appelle-moi. » Il venait de M. Kofi Akpabli, le directeur du département de Communication de mon ancienne école, la Central University.
C’est l’une des personnes que je respecte le plus dans ma vie, je l’appelle « mon boss. » Je l’ai très vite appelé. Il y avait dans sa voix un sentiment d’urgence.
« Il y a une opportunité qui se présente à la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA). Ils veulent former de jeunes journalistes au journalisme d’investigation. Prosper, s’il te plaît, postule, c’est pour ton bien », a-t-il dit
J’ai été profondément touché et honoré par sa considération. Il a vraiment à cœur le bien-être de ses anciens élèves.
À ce moment-là, j’étais préoccupé par l’obtention de mon diplôme et mon affectation dans le cadre du service national. Cependant, la perspective de participer à un stage recommandé par le seul Ghanéen à avoir remporté deux fois le prix du journalisme africain de CNN a stimulé mon intérêt.
J’ai donc postulé.
Une semaine plus tard, les affectations pour le service national ont été publiées et j’ai été affecté à la raffinerie de pétrole de Tema (TOR). J’ai souri. Cela signifiait qu’on m’avait épargné un voyage à plusieurs centaines de kilomètres de chez moi.
Afin de satisfaire aux exigences du service national, je me suis rendu dans l’un des bureaux du régime national d’assurance maladie pour obtenir une carte d’assurance. Tout en accomplissant mon devoir de citoyen, je ne cessai de me demander si l’équipe chargée du recrutement des stagiaires avait reçu ma demande et si j’avais été retenu.
Dans le bus qui me ramenait chez moi, alors que le monologue dans ma tête s’intensifiait, la sonnerie de mon téléphone m’a tiré de ma rêverie.
« Bonjour », ai-je dit calmement sur un ton qui laissait entendre que je n’étais pas d’humeur à discuter longuement. Je ne me doutais pas que cet appel était porteur de la bonne nouvelle que j’attendais. L’appelant m’a dit que ma candidature avait été reçue et que je devais me rendre dans les locaux de la MFWA pour un test d’aptitude. J’étais fou de joie.
Une trentaine de personnes se sont présentées à ce test d’aptitude. Quatre jours plus tard, j’ai reçu un SMS me félicitant d’avoir réussi.
On me demandait à présent de me présenter à l’orientation. Le cœur rempli de joie, j’ai fait une prière silencieuse.
En somme, le stage de formation de la nouvelle génération de journalistes d’investigation de la MFWA est le premier du genre au Ghana et j’ai été sélectionné pour faire partie des 10 heureux élus qui suivront une formation intensive de cinq mois en journalisme d’investigation.
J’avais beaucoup d’attentes. La principale était d’apprendre à rédiger des articles d’investigation marquants.
Les activités
J’ai recueilli des perles de sagesse, de connaissances et de courage auprès des formateurs.
Deux noms respectés du journalisme d’investigation au Ghana ont constamment été évoqués au cours des cinq mois : Anas Aremeyaw Anas et Manasseh Azure Awuni. Nous avons eu le privilège de les rencontrer tous les deux. Ils étaient magnanimes quant à leur réussite, mais n’ont pas manqué de souligner que la trousse à outils d’un journaliste d’investigation accompli doit comprendre du courage et de l’audace.
J’ai adoré la série d’activités, notamment les débats. J’ai d’ailleurs remporté l’un d’entre eux de justesse contre mon adversaire, qui a donné le meilleur d’elle-même pour défendre sa position sur la question : « Avec la naissance des réseaux sociaux, les médias traditionnels vont sûrement mourir ». Ce fut pour moi une excellente occasion d’apprendre.
Dans le but de nous faire connaître le milieu et d’apprendre des acteurs de ce dernier, nos formateurs ont organisé des réunions avec des institutions dont le travail a un impact direct sur le journalisme.
Notre première visite a été le bureau de la Commission du droit à l’information (DAI). L’interaction avec le secrétaire exécutif de la Commission, M. Yaw Sarpong Boateng, m’a ouvert les yeux. Bien que le journalisme se nourrisse d’informations, avant de participer au stage, j’avais perdu la notion de droit à l’information.
Cependant, grâce aux connaissances que j’ai acquises de mes échanges avec les fonctionnaires de la Commission du droit à l’information et avec Kwaku Krobea Asante, notre formateur sur la loi au cours de la formation, j’ai décidé de tester la loi en écrivant au département de la circulation et des transports du service de police du Ghana pour obtenir des statistiques sur les accidents sur l’autoroute Accra-Tema.
Nous avons également visité la Commission nationale des médias (NMC), l’un des organes de réglementation des médias au Ghana. Cette rencontre a été tout aussi instructive.
Camps d’entraînement
Imaginez 10 jeunes journalistes réunis dans un hôtel pendant une semaine dans le cadre d’une formation. C’était aussi trépidant qu’amusant. Nous avons organisé deux de ces camps d’entraînement.
Le premier s’est déroulé au cœur d’Accra, à l’hôtel Sun Lodge, et l’autre au magnifique Hepzibah Christian Centre à Aburi, dans la région de l’Est. Hepzibah, situé sur une montagne verdoyante, offrait convivialité et sérénité. Je suis tombé amoureux de la formation, une fois de plus, alors que je me trouvais plongé dans la tranquillité de Hepzibah.
Visite sur le terrain
Après des mois de théorie où nous nous armions de bravoure et d’audace, nous avons pris le départ pour notre premier test en matière de journalisme d’investigation.
Nous suivions à la trace les milliards de cedis qui se volatilisaient dans le pays sous forme d’infrastructures éducatives et de santé.
J’ai été envoyé dans la région de Bono et dans celle de Bono Est pour faire un reportage sur cinq projets de bâtiments ‘’E-Block’’ abandonnés – mon premier pas dans le journalisme, que j’allais apprécier pendant longtemps.
J’étais seul, tout dépendait de moi. Il n’y avait pas de formateur pour me servir de boussole.
Nos formateurs nous avaient préparés et armés des compétences nécessaires pour nous épanouir dans ces conditions peu familières. Pour pouvoir faire les reportages sur les sites abandonnés des ‘’E-blocks’’, je me suis beaucoup appuyé sur ce que j’avais appris dans les camps d’entraînement pendant le stage. Je suis revenu avec des histoires convaincantes sur les projets ‘’E-Blocks’’ abandonnés et j’étais fier de moi.
Ma mission a été en partie réussie grâce à la grande gentillesse des habitants des communautés que j’ai visitées. Leur accueil enthousiaste était fondé sur l’espoir que mon histoire changera la situation de ces projets ‘’E-blocks’’ abandonnés dans leur communauté.
L’hospitalité reçue dans les différentes assemblées municipales où se trouvent les projets ‘’E-Blocks’’ abandonnés était intéressante. Les responsables des assemblées municipales que j’ai visitées, munis d’une carte d’identité ou d’une lettre de présentation de la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest, n’ont pas hésité à me parler parce qu’ils ont dit : « La MFWA est une organisation respectable, donc un journaliste de la MFWA aura sûrement à cœur le développement de sa municipalité et de la nation. »
Fort des compétences que j’ai acquises en matière de vérification des faits, d’éthique des médias, de journalisme de données, de journalisme mobile et du processus d’enquête pour développer une histoire, je vois l’opportunité de demander des comptes aux titulaires de charges publiques.
En outre, le fait de côtoyer certains des meilleurs journalistes du pays à The Fourth Estate m’a permis de puiser dans leur source de connaissances.
Alors que les jours se sont transformés en mois, je suis convaincu que le fait de participer au stage de formation de la nouvelle génération de journalistes d’investigation de la Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest est l’une des meilleures décisions que j’aie jamais prises.