En ce jour, 13 décembre 2022, Journée Internationale des droits de l’homme, survient le souvenir d’un incident douloureux pour le paysage médiatique Ouest Africain, et plus particulièrement, pour nos confrères du pays des hommes intègres, le Burkina Faso. Cela fait exactement 24 ans que le célèbre journaliste d’investigation Burkinabé, Norbert Zongo, a été assassiné.
Né le 13 juillet 1949, Norbert Zongo crée le 3 juin 1993 l’hebdomadaire l’Independent dont la devise était « la liberté d’informer, le droit de penser ». Aussi connu sous le pseudonyme de Henri Segbo, Zongo était un fervent défenseur de la liberté de la presse et des sans voix en Afrique.
Intrépide et très critique envers le régime de l’ex-président Blaise Compaoré qui a duré 27 ans, Norbert Zongo jouissait d’une notoriété sans précèdent auprès de la population burkinabé.
En 1998, son engagement à poursuivre les sujets d’intérêt public ainsi que sa soif de transparence et de bonne gouvernance lui feront vivre l’une des périodes les plus mouvementées de sa carrière. Norbert, qui était qualifié de « prisonnier de la vérité » par ses proches, a reçu des menaces de mort lorsqu’il a entrepris de mener une enquête sur la disparition mystérieuse de David Ouedraogo, le chauffeur de François Compaoré, le frère de Blaise Compaoré alors Président du Burkina Faso.
Le journaliste poursuivi sa quête de vérité malgré de multiples menaces. Cependant, le 13 décembre 1998, la presse africaine a été abasourdie à la nouvelle de la découverte des dépouilles du journaliste, de son frère, son chauffeur et un autre de ses employés à Sapouy, à 100 kilomètres au Sud de Ouagadougou, la capitale burkinabé.
Norbert Zongo, Ernest Zongo, Blaise Ilboudo et Ablassé Nikiéma ont été retrouvés dans leur voiture calcinée.
Le rapport officiel a révélé un accident de circulation, tandis que d’autres enquêtes indépendantes menées par des institutions non-gouvernementales ont révélé que la voiture calcinée de Segbo était parfaitement garée et ne portait aucun signe de collision.
Pendant plusieurs années, les organisations de défense de la liberté de la presse ont appelé les autorités burkinabè à faire toute la lumière sur l’assassinat du journaliste. Mais, malgré les enquêtes indépendantes, la pression des organisations des droits de l’homme et des journalistes, ainsi que les soulèvements populaires à Ouagadougou, la justice Burkinabé n’a visiblement jamais pu élucider le mystère autour du meurtre du journaliste d’investigation.
En 2016, aux lendemains de la chute du régime Compaoré, le dossier a finalement été rouvert, après plusieurs tentatives d’identification de suspects en 1999, en 2001 et un non-lieu émis par la cour de première instance de Ouagadougou en 2006.
En 2021, une demande d’extradition du principal suspect dans cette affaire de meurtre, François Compaoré, vers le Burkina Faso a été contestée par ses avocats. Ces derniers ont introduit un recours devant le Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative de la France. Le meurtre de Norbert Zongo reste des lors impuni et 24 ans plus tard le Burkina et le Centre National de Presse Norbert Zongo (CN-PNZ) demande toujours des réponses.
Ce cas est un exemple palpable de l’impunité qui a longtemps existé en Afrique. Des menaces aux intimidations, en passant par les attaques physiques menant souvent à la mort, les méthodes de musellement et de violation de la liberté de la presse restent jusqu’à présent les mêmes et les autorités peinent toujours à y remédier. Ce tragique évènement de 1998 se joint à plusieurs autres cas non résolus de journalistes qui ont perdu leurs vies pour avoir refusé de « bâillonner leurs plumes ».
La Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) est profondément attristée et extrêmement préoccupée par le manque de justice, plus de deux décennies après le meurtre de Norbert Zongo. Alors que nous souhaitons à la communauté des médias du Burkina Faso une commémoration réussie du 24ème anniversaire du meurtre de Norbert Zongo, nous exhortons vivement le gouvernement du Burkina Faso à mettre tout en œuvre pour que justice soit rendue.
Le meurtre du journaliste et de ses compagnons ainsi que le manque de justice constituent une violation grave des droits de l’homme. Alors, en ce journée internationale des droits de l’homme, la MFWA se joint à son partenaires burkinabé, Centre de presse- Norbert Zongo (CNP-NZ), la fraternité des médias africaine ainsi que le peuple burkinabé pour appeler les autorités du pays des hommes intègres à faire plus d’effort pour assurer la justice dans l’affaire Norbert Zongo, et à agir pour mettre un terme à la culture d’impunité pour les crimes contre les journalistes.